Différente peau, même serpent. C’est ce que Frank Carter clame, menant les Rattlesnakes sur la scène de la Roudhouse, à Londres. Achevant ici la partie Royaume-Uni de leur tournée, le groupe bouillonne. Retour sur cette soirée.
Dark Rainbow n’a pas encore un mois qu’il monte déjà sur scène. Le nouvel album de Frank Carter & Rattlesnakes est, on l’a vu, plus calme. Pas de beaucoup, certes, mais quand on le compare à ses grands frères, la différence est notable. Alors quoi, le groupe va aussi se calmer en live ? Vont-ils reprendre la formule de leurs lives intimistes, présentés à la sortie de l’album ? Bien sûr que non.
PREMIÈRES PARTIES
Mais avant d’être témoin de ce qui change et de ce qui ne change pas, petits mots sur les premières parties. HotWax ouvre le bal, un peu timidement dans l’attitude, mais pas dans la musique. Le trio envoi du bois, mais mériterait de se faire plus confiance encore pour faire sonner le live plus fort encore. À leur suite, The Mysterines, qui sortent un album cet été. Plus défiante, plus confiante, Lia Metcalfe mène la barque avec un sourire en coin. Leur rock alternatif va et vient entre des riffs lourds et profonds, et des mélodies légères. Leur présence est solide. C’est évidemment un groupe à suivre de près.
LA DÉCOUVERTE DE LA MUE
Et puis. Dans son costume blanc, dernier arrivé sur scène, Frank Carter entame le premier acte. Dean Richardson est déjà au piano. L’acte s’appelle ‘Cloudy & Pink’ et monte crescendo avec que des nouveautés. Can I Take You Home et Brambles se suivent avec naturel, poussant doucement les potards des amplis. Et puis Self Love. Je l’attendais beaucoup. Si l’énergie était brulante, elle aurait pu être volcanique. Le titre n’est pas pour autant expédié, le groupe prend le temps, et occupe l’espace scénique comme on pouvait s’y attendre. Le public s’époumone, mais n’en est qu’au début. Avec un jeu de lumières d’abord très fluides, les effets strobos arrivent.
L’acte deux, ‘Like Lighting’, démarre avec les riffs inquiétant de Devil Inside Me. Pas question de renier les origines de ce serpent-là. Quand le refrain éclate, tout part avec : public déchainé sur des pogos de plus en plus gros, lumières rouges et vertes qui suivent la batterie, et bien sûr le chant qui, s’il est plus clair, reste viscéral. Carter le fera beaucoup ce soir : il laisse chanter le public à sa place sur quelques lignes, observateurs conquérant de ce que sa musique provoque.
LA MORSURE AGACÉE
C’est une bonne occasion pour faire un point. Les concerts sont souvent des lieux où les agressions sont légion. Et ce depuis que le monde est monde. Mais on peut tous et toutes faire mieux. Carter & Richardson l’ont compris. Certes, ce n’est pas parfait, mais c’est un début. Alors, si le mec sur scène vous demande de vous écarter pour une unique chanson, pour un pogo 100% féminin, messieurs, obtempérez. Le concert n’en sera que meilleur pour tout le monde, et vous pourrez voir un pogo de légende. Et bien sûr, on n’agresse personne, jamais. Fin du point.
Pour le reste de l’acte deux, le plus long, les classiques s’enchainent. Kitty Sucker précède le fameux Wild Flowers, lui-même précédant Tyrant Lizard King. Au milieu, extrait du nouvel album, Honey rugi. Le titre est une bombe à retardement. Déjà ultra-efficace en studio, en live, c’est une autre dimension. En tout cas, ce soir-là, c’est sur ce titre que je comprends que la mue n’a pas changé la nature du serpent.
LA NATURE DU SERPENT
Go Get a Tattoo, My Town et Cupid’s Arrow, tous les trois extraits de Sticky, termine ce deuxième acte. Le troisième, c’est le ‘Redemption Arc’. L’énergie change radicalement. Commence Queen of Hearts. La voix de Carter et la guitare de Richardson se répondent, se complètent. La lumière est minimaliste, l’atmosphère enchanteresse. Ce n’est pourtant pas la fin du show. Simplement une pause, une respiration nécessaire pour la suite. Thunder et Crowbar montent en puissance progressivement. Puis arrive Juggernaut. Brutal, puissant, et toujours impressionnant, Carter en profite pour son classique bain de foule. Un slam plus tard, il retourne sur scène pour Lullaby.
S’il s’adresse à sa fille ici, il continue avec Happier Days, un autre titre qui envoie à fond en live, et End of Suffering. L’anxiété et la souffrance mentale font aussi partie des thèmes récurant du groupe. En live, c’est d’autant plus fort. L’association de ces trois titres fait mouche. Richardson retourne au piano pour clore End of Suffering. C’est une parfaite fin, la narration était bien pensée… et pourtant, il manque quelque chose.
DIFFÉRENTE PEAU, MÊME BÊTE
Plutôt qu’un rappel, ils choisissent d’appeler cette toute dernière partie l’épilogue. Il débute avec la même douceur que la fin de l’acte trois, Angel Wings. Bien sûr, ils enchainent avec le ‘ne-le-prenez-pas-personnellement’ I Hate You. C’est le dernier moment pour se défouler, sur scène et dans le public. Toujours en blanc, Carter commande la foule avec un sourire en coin. Quelques remerciements achèvent le titre. C’est la fin… Après Man of the Hour. Car il ne pouvait pas laisser son titre phare dans les coulisses. Puissant, entêtant, on l’entend partout à la sortie.
Si c’était un concert hautement satisfaisant, peut-être qu’il ne fait pas l’unanimité pour celles et ceux en recherche du côté le plus hardcore du groupe. Pour moi, c’est le témoignage d’une mue réussie, une évolution logique et salvatrice. Si c’est le genre de choses qui permet d’assister à ces grandes messes punks, alors on espère qu’ils continueront d’évoluer. Il a raison : Different skin, same snake.
Frank Carter & The Rattlesnakes entament maintenant leurs tournées en Europe puis aux États-Unis, et cet été en festival. Ne les manquez pas.
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Hot Wax – LF
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