Quelques mots avec… charles

Juste avant de commencer sa tournée, l’auteure-interprète dark-pop CHARLES a accepté d’échanger avec moi sur son double-EP SABOTAGE. Interview.

Unis Son : SABOTAGE, c’est un EP qui est hyper personnel. En tout cas quand on l’écoute, on sent que tu es vraiment impliquée émotionnellement. Ça parle d’abus, ça parle de doutes, ça parle d’addictions diverses. Est-ce que tu as vu un peu cet EP comme une forme de thérapie ?

CHARLES : Oui, en fait, la musique en général, globalement, c’est toujours une thérapie pour moi. J’ai sorti un premier EP, un album, et maintenant avec ce double EP-là, j’aborde toujours des thèmes assez difficiles, que soit je vis, soit mon entourage vit, et c’est une manière pour moi d’extérioriser. Pas parce que je suis quelqu’un de négatif, au contraire. C’est vraiment juste quand je vis des choses difficiles pour passer à autre chose et pour mettre ça derrière moi, j’ai besoin d’écrire. Mais surtout de le mettre en musique. C’est grâce à ça que j’arrive à passer à autre chose ou mettre une situation difficile de côté dans ma vie. Parfois ça prend cinq ou dix chansons sur le même thème avant de les mettre de côté, parfois une, mais c’est clairement mon moyen d’extérioriser.

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US : Tu avais besoin d’extérioriser tes propres sabotages Tu dis que tu parles aussi de ceux de ton entourage. Est-ce que dans l’EP, c’est les tiens, ou est-ce que c’est plus vaste que ça ?

CHARLES : C’est plus vaste, mais c’est toujours des choses qui nous touchent d’une manière ou d’une autre. Je suis quelqu’un d’hyper empathique et de très sensible. Donc dès que ça touche à mon entourage, ça me touche vraiment fort aussi. J’essaye de mettre du recul par rapport à ça, mais parfois c’est difficile, et j’ai besoin d’extérioriser à ce niveau-là. Parce que parfois aussi, je perds des amitiés. J’ai perdu des amitiés parce que des gens étaient dans un certain excès, que j’ai moi-même pas pu sauver, même si c’est pas mon rôle. Ça m’a quand même touchée.

Tout ce qui est abus, tout ce qui est excès de drogues, addiction à la drogue, addiction à la fête, etc., ça fait partie un peu de mon cheminement de vie d’adulte. Au début de l’EP, je parle de l’autosabotage en mode anxiété : le Covid, la bulle, je sais pas ce que je fais de ma vie, je sais pas ce que je fais de mes journées… Je me lance dans la musique et je sais pas où je vais. J’arrive à Bruxelles, je connais personne…

Charles

Quand on a pu enfin sortir et que c’était le dé-confinement, à ce moment-là, il y a eu tous ces excès. On avait hâte de sortir et de vivre des choses, et j’ai découvert le monde de la nuit et tout ce dont j’avais pas touché avant. Je me suis retrouvée dans un petit groupe d’amis qui était aussi dans les excès, et donc forcément, on s’est pas tiré vers le haut. Ça a mené à des relations toxiques, j’en parle dans la chanson silence/Inner Peace, ça a mené à des addictions.

Mais ça a mené aussi à une construction, et à plein d’expériences qui m’ont fait me remettre en question sur plein de choses. Et surtout, savoir ce que je veux et ce que je veux pas dans la vie. C’est pas que du négatif. C’est des expériences un peu compliquées, mais que plein de gens expérimentent à un certain moment dans leur vie.

US : On sent qu’il y a une maturité derrière tes textes, et d’ailleurs, en parlant de textes à la base, tu écris en anglais, mais là, tu as aussi décidé décrire en français. J’aurais pensé que tu aurais mis l’EP en anglais en avant, sur le disque 1, sauf que le disque 1 c’est l’EP en français. Pourquoi ?

CHARLES : Parce qu’au-delà du fait que j’avais envie d’expérimenter quelque chose d’autre et d’apprendre de nouveaux styles avec le français, il y a aussi un but plus stratégique, plus territorial. J’avais envie de toucher un peu la France et de m’exporter un petit peu de la Belgique. Vu que c’était aussi quelque chose de nouveau, j’avais envie de le mettre en avant. Et il y a quand même plus de versions françaises que je préfère aux versions en anglais. J’avais envie de mettre les versions françaises en avant.

Charles

US : Ce qui est intéressant avec ces deux versions de l’EP, c’est que ce n’est pas juste de la traduction, mais de la réécriture c’est ça ? 

CHARLES : Ah ouais, c’est impossible de juste traduire ! C’est trop moche sinon, c’est une catastrophe ! Ça a été un travail de réécriture, et c’est ça qui était super difficile à faire. Parce que quand j’écris une chanson, vu que c’est ma manière d’extérioriser, ça me fait un bien fou, une libération, et bam, je passe à autre chose. De là, je dois reprendre la chanson, me replonger dans le moment, l’émotion, et ce que je vivais à ce moment-là… Me replonger dedans et réécrire un texte qui est dans une langue dans laquelle j’avais jamais écrit avant, c’était un travail très fastidieux. Et que je ne referais d’ailleurs jamais, pour être honnête !

Mais ça m’a appris plein de choses. J’ai travaillé avec plein de gens qui écrivent en français depuis toujours. Je n’allais pas m’improviser de poète en deux jours, et j’avais envie de m’entourer d’auteur.trices compétent.e.s, pour le faire avec moi. J’avais envie que ce soit bien fait, et d’apprendre aussi. Maintenant j’écris en français de moi-même, je commence les chansons du début, toute seule, mais je fais quand même encore les deux. Je pense que si je fais un projet plus tard, il y aura peut-être les deux dans le projet, dans l’album il y aura des chansons en anglais, des chansons en français peut-être, mais il y aura plus ce truc de réécriture. C’était hyper enrichissant, mais vraiment compliqué.

En écoute : miroir

US : Mais tu vas quand même potentiellement ressortir des chansons en français ?

CHARLES : Ouais, c’est une possibilité. En tout cas j’en écris. Je suis en studio là, je suis toujours en studio, droite à gauche. Quand je m’installe, ça dépend du mood du studio, mais la plupart du temps maintenant j’écris des chansons en français.

US : Et pourquoi est-ce que tu as voulu faire cette EP-là dans les deux langues ? Pourquoi ça t’est venu maintenant ?

CHARLES : Je me suis rendu compte avec le fil du temps que je rencontrais de plus en plus d’artistes, qui devenaient même mes amis, qui faisaient du français. Et je trouvais ça hyper beau et hyper poignant. Avant j’écoutais pas du tout de français, et quand j’écoute des artistes comme iliona, comme Yoa, je me dis qu’en fait c’est trop stylé. Je me suis dit que j’avais envie d’acquérir des nouvelles compétences et donc de tester par moi-même. Au début, j’arrivais pas à trouver ma patte. Soit, tu peux vite être très cliché dans tes mots, soit être trop métaphorique et là on comprend rien et c’est chiant. Fallait trouver le juste milieu.

Quand j’ai commencé, je tombais directement sans le vouloir dans de la chanson française, vraiment j’avais plus du tout mon univers. C’était trop bizarre. Et en fait, ce concept-là de reprendre des chansons qui existaient déjà en anglais et les réécrire en français, ça a fait en sorte que je garde mon univers musical authentique, que j’arrive à le retranscrire, et que je me dise ok, j’arrive à combiner les deux. Ça marche même musicalement, ça fait un peu une transition. On essaie de voir est-ce que mes chansons, mon univers, en ont le même match avec le français.

En écoute : Red Light

US : Tu as mentionné que tu étais en studio à droite à gauche, c’est quoi la suite ?

CHARLES : La suite dans l’instant T, c’est les concerts. Là, je suis vraiment en période de pré-production pour le live. J’ai déjà fait deux semaines de pré-prod, et maintenant il me reste cinq jours de répét’ avec tout mon band, pour monter le show. Je fais quelques concerts qui commencent une petite tournée, qui commence en avril. Je fais des clubs du côté de la Wallonie, à Bruxelles au Botanique, je vais à Gent, Amsterdam, puis je fais des festivals aussi cet été. Même à Montréal !

J’ai trop hâte, parce que c’est mon moment préféré d’artiste, c’est la consécration de toutes les chansons qu’on a écrites et qu’on a tirées de son être et les partager avec les gens ! Il n’y a pas vraiment de suite au niveau des sorties. Je suis toujours quelqu’un qui est productif et qui a des idées, donc j’en profite et je crée tout le temps, en tout cas un maximum. Après les concerts, clairement dans l’idée j’aimerais bien partir sur un prochain album. Mais ce sera à voir quoi, il n’y a vraiment rien qui est fait.

US : D’accord, et tu as des concerts en France à venir ?

CHARLES : Ouais j’en ai un à Paris, le 23 avril, au FGO Barbara.

US : Et ma dernière question : quel est ton premier souvenir musical ? 

CHARLES : Ah purée, j’adore cette question ! Mon premier souvenir musical, c’est quand… je ne sais même pas quel âge j’avais, je devais avoir je ne sais pas, 2-3 ans, et je m’en rappelle très bien. J’écoutais en boucle la chanson de Shania Twain, Man, I Feel Like a Woman. J’étais sur les genoux de ma maman, devant l’ordinateur, j’ai vraiment un souvenir très précis de ça, et je lui demandais de la remettre. Je regardais le clip sur l’ordinateur, sur YouTube, et je lui demandais de la remettre en boucle, et en boucle, et en boucle. Et elle en pouvait plus ma mère !

Mais j’avais vraiment cette image, de cette femme badass, avec les mecs derrière qui jouent de la guitare et tout, ça m’a vraiment marquée quand j’étais petite. Mon tout premier souvenir musical, c’est Shania Twain, sur les genoux de ma mère, c’est un souvenir très précis. Pourtant j’étais vraiment très très petite, mais ça m’a marquée, je ne sais pas pourquoi. Ça m’a vraiment donné envie de faire de la musique directe je crois.

Merci encore à CHARLES d’avoir pris le temps de répondre à mes questions avec autant de générosité et de sincérité ! Merci aussi à son équipe et Cassandre pour avoir aidé à organiser la rencontre ! N’oubliez pas d’aller la voir sur scène ce printemps !


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📷CHARLES YVN / CLOTILDE BILLIETTE
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