Virgin
Sortie : Septembre 2009
Balayons d’entrée la question que tout le monde se pose à juste titre ; non, Duvall n’est pas la réincarnation de Layne Stanley, et, j’allais dire, c’est tant mieux ! Non que sa voix ne soit pas capable de rappeler assez souvent celle du défunt junkie qui officiait à son poste le siècle dernier, mais tout simplement parce que, sans chercher à le remplacer ou à l’imiter, la nouvelle (?) recrue haïtienne s’est complètement fondue dans l’entité Alice In Chains et qu’elle sait relever avec un brio certain le challenge, pourtant conséquent, qui était le sien.
Epaulé la plupart du temps, comme à la grande époque par l’incroyable Jerry Cantrell sur les couplets, l’alchimie fonctionne à merveille. Duvall s’énerve, sur certains titres, beaucoup plus que son prédécesseur mais ces excès de rage sont sans cesse contrebalancés par la voix carressante du guitariste.
Ce durcissement du ton se fait sentir dès le premier titre “All Secrets Known”, les guitares sans doute un peu plus agressives que dans nos souvenirs. Mais c’est pour mieux amener le single, “Check My Brain”, qui nous propulse quelques 15 ans en arrière et le superbe “Last of my Kind”, sans doute le titre sur lequel la voix du nouveau chanteur s’éloigne le plus de celle de Stanley pour rappeler plutôt Maynard Keenan de Tool, dont le pont semble s’inspirer ingénieusement.
Sans renouer avec la noirceur mélancolique d’un “Sap” ou d’un “Jar of Flies”, l’électro-acoustique “Your Decision” déçoit un petit peu mais est vite excusé par les 7 minutes de “A Looking in View”, où lourdeur et mélodies cohabitent comme au bon vieux temps des boucs, chemises à carreaux et Doc Martens piétinant le cheveu gras collé à la bière.
“Acid Bubble”, après un démarrage typiquement «alicien», durcit le ton dès la 3ème minute rappelant, une nouvelle fois le Tool des débuts, mais comment dissocier les deux groupes. Loin de copier, Alice se contente d’en emprunter un bout d’ambiance avant de plonger dans l’un de ces solos dont Jerry Cantrell seul a le secret.
Même si cela n’intéresse pas grand monde dans le cadre de cette chronique, je me souviendrai toute ma vie du jour où, fan ultime d’Alice in Chains que j’étais, et déplorant leur trop rare discographie, j’allais voir un vendeur de la Fnac pour m’enquérir d’un groupe «dans le même genre», ce dernier (Dieu l’en bénisse) m’avait alors dirigé vers le second album de Tool et son “Sober” dantesque. “Lesson Learned”, toujours aussi «alicien» avec son refrain que l’on jurerait passé à l’envers, se voit gratifier d’un magnifique solo tout en feeling tandis que la 5 rythmique, inchangée, assure un boulot à la fois lourd et dynamique d’une efficacité sans faille.
L’apaisé “Black Gives Way to the Blue” clôt superbement l’album sur une touche d’optimisme, tout relatif, ça reste du Alice in Chains quand même, nous laissant espérer de fort beaux concerts et la poursuite d’une carrière jusqu’à maintenant sans faute de goût.
Certes cet album n’est pas le Back in Black d’Alice in Chains mais donne foutrement envie de les voir remonter sur les planches comme lors de leur dernier passage au Bataclan à Paris où, en quelques titres à peine, la nouvelle formation avait su combler les attentes du public.