Jah Is Real
Burning Music Productions
Sortie : Novembre 2009
Cela fait plus de 30 ans que la musique jamaïquaine propage ses vibrations ensoleillées à travers le monde, et forcément, plus le temps passe, plus le nombre des pères fondateurs du reggae toujours en activité diminue. Avec Jah Is Real (jusqu’alors inédit en France), Burning Spear maintient la flamme «roots reggae» en vie et attise les braises de la liberté.
Burning Spear, aka Winston Rodney, est l’un des papas du reggae qui, depuis sa toute première session d’enregistrement au Studio One en 1969, n’a jamais cessé de produire de la musique et de sortir régulièrement des nouvelles tunes (à raison d’un opus tous les deux ou trois ans).
Pour autant, son impressionnante collection d’enregistrements live et studio est toujours restée fidèle à l’esprit «Rasta» de ses premiers disques («I’m just a man, not a rich man, a rastaman !» nous rappelle t-il d’ailleurs sur le titre “Run For Your Life”) ; ou un roots reggae doté d’une conscience sociale, de riffs mélodiques entêtants et d’un flow irrésistiblement «smooth» reconnaissable entre 1000… une recette immuable qui demeure toujours aussi efficace en dépit du temps qui passe.
La preuve en est avec son dernier album, Jah Is Real, où le rasta-man, toujours égal à lui-même, fait flotter bien haut son étendard aux couleurs (rouge/jaune/vert) de son roots reggae authentique.
Comme au début de sa carrière, la musique de Spear véhicule des messages de rébellion et de célébration, au travers de textes conscients, soucieux de l’histoire, et qui soulignent l’importance de rester fidèle à ses convictions, quitte à perdre quelques amis au passage.
Spear fustige d’ailleurs clairement la «filouterie» de l’industrie du disque sur le titre, “Wickedness” («They been looting, looting, looting reggae music…/ Since 1969 oh 1969 / They been robbing I …/ They been exploiting I»). Winston Rodney a peut-être fait voeux de prêcher la paix et l’unité, mais il n’est pas pour autant prêt à se laisser exploiter et ficeler par des contrats douteux… ’cause «I-man a free man», comme il l’a toujours dit! Raison pour laquelle il a décidé de reprendre sa liberté et le contrôle de son réseau commercial en fondant le label, Burning Music Productions, via lequel il a re-pressé la quasi totalité de son catalogue et sorti ce nouvel opus, donc.
Enregistré et mixé au Magic Shop Studio de New-York, Jah Is Real séduit immédiatement par sa richesse, son mélange de vibes «easygoing» et de grooves indolents. Les harmonies vocales sont également mises à l’honneur tout au long de l’album, donnant du corps à la voix et au flow nonchalant de Rodney. On citera par exemple, le titre, “Africa”, sur lequel les vocaux et chœurs gospel féminins apportent de la substance aux exhortations de Spear «de se rassembler» («to come together now»), tout en injectant une dose d’«African-American church music» à l’ensemble.
Bernie Worrell et Bootsy Collins se sont également joints aux réjouissances (respectivement, à l’orgue et à la basse) sur quatre titres.
L’opus se clôt sur un remix de “Step It” par Brian Hardgroove, où les nappes de drum’n'bass insistantes se fondent naturellement dans le décor organique.
Cet album tourne donc une nouvelle page de la carrière du reggae-man tout en s’inscrivant dans le prolongement de sa discographie… un must have !