Etat Civil
Infrastition Records
Sortie : Décembre 2009
Et si l’on détenait là “le meilleur album de rock français depuis … (remplissez par ce qui vous semble le plus approprié)”. Oui ! Un de ces disques à haute qualité musicale par un de ces groupes qui ne cherchent à imiter personne. Une belle perle rare, noire, enragée, proche de la perfection.
Toute bonne chronique d’album se doit d’égrainer les influences et les similitudes pour mieux cerner le style du bébé. Mais je m’étais promis de ne pas citer Noir Désir (et vous admettrez qu’il est déjà trop tard). Non, parce que c’est trop facile. Non, le groupe Varsovie mérite mieux que d’être considéré comme un ersatz de Noir Dez, ou un produit bis pour les fans vieillissants de Bertrand Cantat.
Varsovie a son univers à part. Aussi bien dans les textes que dans sa musique. Et son “État Civil” est une belle claque dans la gueule, comme on en entend qu’une poignée par an.
Finalement, j’aurais presque envie de les rapprocher d’un autre groupe indépendant, les Luxembourgeois de Rome. Rome, Varsovie … vous allez dire : “il se foule pas à citer des capitales européennes”. Certes, mais les noms de villes semblent inspirer les bons musiciens. Dans les deux cas, des références aux déchirures de l’Histoire, une musique sombre, magistrale, produite avec beaucoup de classe. À la différence que Varsovie est purement groupe à guitares, aux sonorités plus oppressantes.
Sombre et hargneuse, sans être dépressive ni anxiogène, la musique de Varsovie s’appuie sur deux fondamentaux : les textes d’Arnault Destal, souvent plus déclamés que chantés, et les riffs convulsifs Grégory Cathérina.
Sur plusieurs titres, comme les sublimes “Clandestine” ou “Inertie”, le chant s’arrête à mi-piste pour laisser place à d’entêtants passages instrumentaux. Ça couine, ça accroche, ça geint. C’est du très bon. Et que dire des paroles…
Le talent littéraire d’Arnault est une véritable bouffée d’oxygène comparé au niveau intellectuel sociétal. De celui qui nous avais déjà mis en garde que “la chute est la plus sûre des lois“, il est difficile de citer un extrait plus qu’un autre tellement l’ensemble est bien écrit. “On aura vu crever tout ce qu’on aimait jusqu’à s’en foutre” est quand même un de mes passages préférés. Et puis on y apprend que “Messaline” n’est pas le nom d’un médicament …
“Les highlights, les highlights” me criez-vous ! Eh bien, en fait toutes les pistes sont excellentes.
“État d’urgence”, “L’Art de la fugue” … tout est fait pour que ce disque tourne en boucle sur votre platine pendant trèèèèès longtemps.
Etat Civil est un disque hivernale, magnifique et ambigüe comme une jolie jeune fille qui se ballade avec un AK-47 dans la main (comme la photo à l’intérieur du livret).
Bien entendu, l’atmosphère de Varsovie n’est pas destinée à un public festif ballons-de-baudruche-et-
langues-de-belle-mère ; il faut être amateur de rock pour apprécier ce groupe, et aimer -un peu- obscurcir son quotidien.
Plus qu’un album à écouter, plus qu’à album à acheter, un album à soutenir, bien haut.
Lisez l’interview du groupe en cliquant ici.