Colin Chloé

Appeaux

appeaux.jpg
Yy/Orange Productions
Sortie : Février 2010

Quelque chose de surprenant passe dans cet album. Ce chanteur à la voix si posée, nous chante des histoires métissées de Miossec (à qui il emprunte le bassiste) et de Yann Tiersen. Un album de chanson française, bretonne pour être plus précis, sans bagad ni biniou, avec ce désespoir, cette tristesse de l’océan qui nous ennuie toujours, sans jamais nous lasser.

Les guitares chargées comme des langues de marin, les orgues puissants ne nous laissent guère de repos : on s’attache à cette voix jeune et langoureuse, qui parfois évoque un Mickey 3d.
D’emblée, Appeaux  interpelle et attire.
Des textes fragiles et une voix d’équilibriste nous racontent des histoires sans dramaturgie : c’est sans doute de là que vient le malaise.
Sans début ni fin, comme les phrases dont la voix ne descend jamais pour les terminer, les chansons nous disent «banc public», «attente», «digue», «départ» : alors oui, nous sommes au tendre ou au dur des mots, dans les distorsions des cordes qui deviennent celles du temps, dans les aber étranges à la tombée de la nuit, dans ces mélanges d’eau douce et d’eau salée.
La chanson “Mortimer” nous installe dans un imaginaire trouble auquel il est agréable de s’abandonner.
Les moutons paissent à marée basse, quelques algues échouées, et au fond d’un rade, un marin tente vainement d’oublier les verres de vin pour lesquels il a tué sa femme (”Le vin de l’assassin”).
La chanson titre de l’album, “Appeau”, arrive comme une confirmation : mélodiques et douces, voix et harmoniques nous racontent des histoires traversées par la violence magique qui, autour des marais et des landes que l’on croise en “laissant quimper”, vole parfois les âmes des jeunes filles amoureuses et des marins devenus fous de trop de vin.