Black Sands
Ninja Tune/Pias
Sortie : Avril 2010
Les deux précédents disques de Bonobo (Dial ‘M’ For Monkey, en 2003, et Days to Come en 2006) étaient déjà pas mal, mais rien en eux ne laissait présager du pas de géant que Simon Green ferait avec son quatrième opus. Passant du «juste pas mal» au «carrément étourdissant», Green a donné le meilleur de lui-même tout au long de cet album.. simplement grandiose. Le résultat laisse pantois, muet, rêveur, admiratif… Non, on ne fait juste qu’aimer, on adore !
En fait, je dois avouer vous avoir un peu menti… parce qu’en vérité, il y eut bel et bien des signes avant-coureurs de la fulgurante et vertigineuse ascension de cet animal de Bonobo ! Son EP, The Keeper, sorti voilà bientôt six mois (et dont vous pouvez lire la chronique en cliquant ici), laissait effectivement entrevoir l’extraordinaire évolution du travail de composition de Simon Green (a.k.a Bonobo, donc).
En l’espace de cinq versions différentes d’un seul et même titre, le sublime single, “The Keeper”, où se posent avec langueur et une grâce infinie, les vocaux soul ultra sensuels d’Andreya Triana (aussi connue pour ses collaborations avec Mr. Scruff et Flying Lotus), on se doutait bien que Bonobo nous mijotait un album trip-hop/électro-soul-jazz de haute volée… mais de là à devenir un Cinematic Orchestra à lui tout seul et rivaliser avec les grands classiques du collectif (tels que Every Day ou Ma Fleur) il y avait encore de la marge !
Et pourtant… Bonobo se révèle être largement plus doué qu’on ne l’espérait et s’impose aujourd’hui en tant que concurrent direct de ses compagnons de label. Bonobo partage désormais bien plus qu’une maison de disques avec le Cinematic Orchestra, il partage aussi la vedette, voire la lui chipe sous le nez. Car à l’instar de Jason Swinscoe, Green est passé de productions principalement basées sur des samples, à un travail de composition fouillé, reposant sur des instrumentations live subtiles et intriquées. Et alors que le Cinématic Orchestra dépend d’un collectif de musiciens, Bonobo se suffit quasiment à lui-même en jouant de la plupart des instruments.
Maniant avec dextérité les techniques modernes, Green est également passé maître dans l’art de concocter des atmosphères mystérieuses et d’une grande complexité.
Et là, on pourrait très bien disséquer chaque compo de Black Sands et vous parler du disque en termes cliniques, en vous disant, par exemple, que la superposition de couches d’infra-basses et de beats sourds se mêle avec délicatesse à des nappes de synthés lourds, des lignes de guitares low-fi et de cordes orientales, qui créent, au final, un édifice «soul-jazz électro-symphonique» de solide facture.
On pourrait aussi reprendre la track-list du disque et vous donner ainsi 11 bonnes raisons de ne pas passer à côté de se monument «polyrythmique» mélodieux (sans être sirupeux) et émouvant (sans être larmoyant).
Oui, on pourrait… mais on a mieux à faire ; comme écouter (encore et encore) le disque, et la boucler.