novembre 30, 2011
Black Chinese II
L’Amicale Underground
Sortie : Novembre 2011
L’épopée synthétique de Yugo Solo et Francis Fruits des Grenoblois, Rien, se découvre enfin sur long-format, ou la “bande-son-d’-un-film-qui-n’-existe-pas”, mais avec Câlin on prend son ticket quand même, surtout si vous avez la nostalgie des 80′s, de K-2000 et Moroder, puisque sur cet album les vrais héros sont leurs sacro-synths analogiques jusqu’au générique de fin.
En transit à Gstaad suite à une erreur d’aiguillage de leur TGV, Yugo Solo et Francis Fruits, membres émérites du groupe, Rien, zonent sur le quai de la gare. A bout de nerfs, transis de froid, secoués de spasmes, ils finissent par attirer l’attention de John Simpson, mogul hollywoodien venu apporter des revues pornographiques à Roman Polanski dans son chalet.
Le producteur millionnaire leur paie un chocolat chaud, prétend être « huge fan » de Rien, et leur propose dans la foulée de composer la bande originale de sa dernière production, Black Chinese II. Yugo, grand professionnel devant l’éternel, lui demande de quoi parle le film. John lui répond avec ce bagout caractéristique des dealers de rêves :
« Après les sinistres événements survenus à la fin du premier Black Chinese, Stu Chang s’est juré, entre deux coups de peigne à sa splendide coupe afro, de ne jamais refaire confiance à un skinhead végétarien. Au volant de son coupé sport, il sillonne Chicago, cette salope de cité des vents, à la recherche de son père, le mythique footballeur surnommé Green Chinese. Mais quand on a à ses trousses un flic vétéran des deux guerres du Golfe, une ex hystérique qui rêve de vous dynamiter la tronche, et un gang de psychopathes adeptes du Feng Shui, le périple s’avère forcément plus compliqué que prévu. Dans ce genre de micmac, maîtriser le disco ne vous est d’aucun secours… Stu va l’apprendre à ses dépends en volant à la rescousse d’une petite pépée peu farouche comme il les aime, qui le mènera tout droit dans l’antre de son ennemi juré, Techno Tom, entouré de sa horde de cyborgs à l’effigie de Vanilla Ice. »
Le cortex des deux musiciens frigorifiés turbine à plein régime. Ils caressent depuis quelques mois le projet de se lancer dans un duo baptisé Câlin, pour pouvoir enfin faire sortir de leurs crânes les mélodies analogiques et synthétiques qui les torturent.
Dévorer leurs madeleines de Proust musicales, les hymnes eighties, les génériques consuméristes, les vocals lascifs à s’en pendre. Et l’occasion est là, devant eux, sous la forme d’un américain francophile semi-obèse et visiblement en manque de cocaïne. Ils acceptent. Ravi, Simpson leur suggère d’aller vers « du punchy, mais old school. Un truc entre Carpenter et Moroder. » Francis, enivré par les vapeurs de schnaps ambiantes, lui répond « Carpenter, je le baise. » Silence gêné de quelques secondes, au bout duquel Simpson éclate de rire. « yeah, me too. »
Yugo et Francis visionnent les premiers rushes et décident d’en éluder le souvenir au plus vite. Ils imposent Fred “Brain” Monestier à la production, exigent des featurings de Anna Barie (aka ‘NaNa’ de These Are Powers et de Nick des Lazer Crystal - groupe dont ils reprendront le Love Rhombus, devenu Love Rainbow), insistent avec fureur sur la nécessité de poser avec un gros poisson de l’industrie pour leur photo de presse. Flamboyant, délétère, mutin, mélancolique mais JAMAIS nostalgique, Black Chinese II est un objet intemporel.
La bande-son du blockbuster pour l’instant inédit de John Simpson - le film en est à son cinquième remontage suite au décès d’un critique lors d’une projection test - en illustre parfaitement les moments-clé : les flashbacks agressifs mettant en scène le père du héros (Le foot c’est le pied), le combat au ralenti contre les cyborgs de Techno Tom (Robot Wigger), la décapitation de l’ancienne maîtresse (Don’t worry Habibi), ou encore la scène finale de rupture dans un tex mex (Les filles c’est du chinois). Du commun aveu de tous ceux qui ont vu le film terminé, le disque - déjà d’or avant sa sortie - devrait lui survivre sans trop de problème.