Zey disappeared.. pendant 4 ans ! Quatre longues années depuis la gifle du premier album, Thirty Six Minutes, du trio infernal (devenu quatuor) Craftmen Club… Tss tss tss.. c’est pas bien de nous laisser sans nouvelles si longtemps !
Heureusement, les bretons ont l’art et la manière de se faire pardonner.. ils ont même (ré)enrôlé un ex membre guitariste (Michael) pour leur prêter main forte à reconquérir nos oreilles. Leur nouvelle mouture, Eternal Life, est à la hauteur de notre attente et nos attentes.
Cela valait bien une petite conversation et session acoustique en compagnie de Steeve Lannuzel (chanteur/guitariste), Yann Ollivier (batteur) et Michael Gaudé (guitariste).. Marc Corlett (bassiste) étant resté au bercail.
Question : Que s’est-il passé pour vous depuis la dernière fois où l’on s’est rencontrés, il y a QUATRE ans ?
Yann : On a enchaîné sur deux ans de tournée, plus de 120 dates, au Japon, en Belgique, Hongrie.. bref, on a pas mal bougé.. ça fait beaucoup d’énergie à fournir.
Steeve : On a eu besoin de s’arrêter et souffler un peu, de se demander ce qu’on allait faire après.. si on allait faire la même chose ou pas. On aurait très bien pu sortir un deuxième album en 2011, mais il aurait été complètement différent et serait parti dans une toute autre direction, sûrement plus proche du premier.. mais on s’est vite mis d’accord sur le fait qu’on ne voulait surtout pas faire un copié/collé de Thirty-Six Minutes. Refaire la même chose ne nous intéressait pas. Du coup on a laissé de l’eau couler sous les ponts…
Question : Ok, mais QUATRE ans !
Steeve : Tu sais, les groupes passent souvent par différentes phases ; ils posent les jalons de leur style dans un premier album, le deuxième album est généralement un peu “flottant”, et le troisième album est celui de la consécration.. donc on a décidé de passer directement à celui de la consécration ! (rires) On s’est dit qu’on n’allait va pas perdre de temps.. bon d’accord, on en a peut-être perdu un peu, mais on en a gagné en fait ! (rires)
Question : Votre bio précise que durant cette période de remise en question vous avez été proches de vous “perdre en chemin” et “disparaître corps et âme”… ça veut dire quoi exactement ?
Yann : Disons que comme on cherchait une nouvelle direction, il a fallu quitter l’univers de l’album précédent et laisser décanter les choses. J’en ai profité pour monter un autre projet (Thomas Howard Memorial) et chacun a vaqué à d’autres occupations.. Et comme on voulait radicalement changer d’univers, ça créer inévitablement des doutes, et des tensions.. mais bon, de toute façon on a toujours fonctionné comme ça, avec des tensions ! (rires)
Steeve : En fait c’est notre moteur, sinon ça n’avance pas.. il faut toujours que ce soit dans l’urgence, sur le fil.. arriver à la dernière limite et prendre le virage au dernier moment ! Il faut que ce soit tendu sinon on se fait chier, à se prendre la tête et perdre du temps avec “la routine”, ce n’est pas notre mode de fonctionnement.
Question : C’est quoi alors votre mode de fonctionnement ? Vous avez procédé comment pour composer vos nouveaux titres ?
Michael : Ben, pendant quatre ans ça a été comme un gros bouillon.. on avait une grosse marmitte avec plein de morceaux qui tournaient et on l’a passé à la passoire il y a un an.. on a repêché ceux qui nous paraissaient les plus intéressants pour en faire un album solide et homogène.
Question : Au fait Michael, tu ne jouais pas sur le précédent opus… tu sors d’où ?
Michael : En fait, à la base je suis le deuxième bassiste.. je jouais la basse sur le tout premier album, pas le précédent, mais celui d’avant.. le “vrai” tout premier abum qui n’est sorti qu’en Bretagne en 2001. Mais comme j’avais d’autres projets à côté et que je bossais avec d’autres tourneurs, je n’ai pas participé à Thirty Six Minutes.. ils ont plutôt utilisé un sampleur. Or avec ce nouvel album et le changement de style, le sampleur devenait un peu trop restrictif.. ça cadre beaucoup. Du coup, l’idée était de casser la limite du sampleur.. donc là, même si mon boulot à la guitare ressemble pas mal à du sample, par un travail de boucles mélodiques qui reviennent, ça permet tout de même de varier les teintes et donner un côté plus organique.. surtout sur scène. Donc il y avait plusieurs intérêts à rajouter une guitare.
Question : Quelle est la différence (au niveau de l’enregistrement) entre cet album et le précédent ?
Steeve : On avait enregistré Thirty Six Minutes en Belgique, et là on a enregistré chez nous, dans notre local à Guingamp, puis on a tout envoyé aux US, pour que Scott Greiner fasse le mixage (c’est lui qui avait déjà mixé Thirty Six Minutes).. À part ça, il n’y a pas eu de différences majeures.. on a une manière d’enregistrer assez particulière.. toujours sous tension et un peu chaotique… et au final c’est ce qui donne cette tension sur le disque. Donc, cet album n’a pas été plus ou moins facile que les deux précédents. A quelques détails près, c’est toujours le même mode opératoire.. on acouche dans la douleur ! (rires)
Question : Comment décririez-vous votre évolution entre cet album et celui d’avant ?
Yann : En gros, tu passes de 1880 à 1980.. (rires)
Steeve : Tu fais un grand bond.. juste 100 ans d’écart ! (rires)
Yann : Ceci dit, certains morceaux de l’album précédent avaient déjà amorcés notre transition..
Question : Cet album est intégralement en anglais alors qu’il y avait deux titres en français sur le précédent… Devenez-vous complètement allergique au français ?
Steeve : Non pas du tout. C’est juste que l’anglais se prête mieux à la composition de certains textes, et les sonorités anglaises collent davantage à certaines ambiances.. mais rien ne dit que le prochain album ne soit pas intégralement en français, même si j’en doute un peu.. (rires)
Question : C’est moi ou cet album est encore plus dark que le précédent et les ambiances plus hostiles..?
Steeve : Ce n’était pas un parti pris conscient.. Disons qu’au fur et à mesure, ce son dark et ces ambiances se sont développés et presque imposés.. du coup les textes sont allés eux aussi dans ce sens. Ils sont plus ou moins inspirés des romans de science-fiction genre Blade Runner.. ils dépeignent un futur très proche.. un peu ce qu’on vit actuellement, dans le genre Big Brother… une société dans laquelle on est surveillés en permanence (comme dans “Silent Machines”) et qui donne un sentiment de mal-être individuel et collectif. Par exemple “Animals” parle du comportement des gens dans la rue, dans un “milieu naturel” sélectif où l’on est toujours traqués et où l’on est tous en mode “instinct de survie”, comme les animaux. C’est ce que je ressens quand je viens à Paris et que je prends le métro..
Question : Peux-tu nous dire deux mots sur le titre “Click On The Box” ? Il est très différent des autres je trouve…
Steeve : Ce morceau raconte l’histoire d’un gars qui pète un câble devant sa télé et qui croit qu’il peut commander le monde avec sa télécommande…
Michael : C’est un morceau super pesant et très lent.. on est à 92BPM, donc il est très très lent.
Yann : C’est du jamais vu dans l’histoire du groupe ! D’habitude notre rythme de croisière avoisine plutôt les 200BPM..
Steeve : D’ailleurs on ne savait pas qu’il était humainement possible de jouer aussi lentement ! (rires)
Question : Faisons un petit portrait chinois de Eternel Life ; si cet album était une avenue/boulevard/rue ?
Steeve : La Grenelle du Diable… c’est une petite rue de Guingamp.
Yann : : Ou le haut de la Rue Jean Jaures à Brest.. elle fait froid dans le dos.
Question : Si c’était une pièce de la maison ?
Steeve : La salle de bains.. parce que ça raisonne..
Yann : Ou la cave, parce qu’il y fait froid..
Michael : Ou une salle de bains à la cave.. (rires)
Yann : Ouais, avec des crochets de boucher et des carrelages blancs (rires)
Question : Si c’était un cocktail ?
Steeve : (rires sous cap) Un truc avec des glaçons..
Yann : Et un goût amer.. (rires sous cap)
Steeve : Bon, disons un picon-suze (rire général)
Question : Si c’était un film ?
Steeve : Un film de Kubrick..
Question : Si c’était un vêtement ?
Steeve : Peut-être une veste de chasseur.. (rires)
Yann : Ou alors un Perfecto blanc ! genre François Valery (RIRES)
Question : Si c’était un des 4 éléments ?
Steeve : .. L’eau…
Yann : En même temps j’aurais dit l’air..
Steeve : Ouais mais non, l’eau c’est mieux.
Question : Si c’était un lieu ?
Yann : Si l’album cartonne, la bourse ! (rires)
Steeve : Ou alors une île..
Question : Si c’était un mot ?
Steeve : Aiguisé.