Jacques Séguéla – Interview Musique et Marque
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Véritable pape de la publicité moderne, visionnaire, Jaques Séguéla a mené les campagnes de communication les plus célèbres de France de celle de François Mitterrand à la publicité pour la Citroën A. Ce fils de pub a accepté de répondre à nos questions.
Vous avez vu évoluer la publicité moderne, quels sont les nouveaux enjeux des marques aujourd’hui ? La musique, la culture, plus largement, peut-elle répondre à ces enjeux, que ce soit en tant qu’habillage sonore ou en tant que contenu viral?
Les enjeux des marques hier aujourd’hui et demain restent inchangés, se faire connaître puis se faire aimer, ce n’est donc pas l’âme des marques qui change mais les outils de diffusion de leurs ADN. Avant-hier l’affiche, hier la télé, aujourd’hui le net, mais tout autant les trois à la fois. La télévision fait les marques, le net les buzz et les booste mais il peut les défaire et l’image arrêté du print, reste l’unique moyen d’ancrer durablement le message d’une marque dans l’inconscient collectif. Quant à la musique et à la culture elles ont toujours été partie inhérente de la créativité. Toulouse Lautrec ou Capiello dessinaient les affiches, Cocteau ou Sacha Guitry les titraient, Dali lui même a fait de la pub et même si elle ne les associe pas assez souvent, les artistes continuent d’influencer la pub.
La musique, elle, est l’éternelle diminium de la pub, les premiers pas publicitaires à la radio avant la guerre ont toujours été chantés et que seraient les spots et les vidéos sans bande son ? Que serait le visuel sans l’audio ?
Heureusement les marques dans leurs ensembles sont hémiplégiques. L’immense majorité de leurs investissements sont sur l’image et les mots, la musique n’a que les restes. Erreur fatale ! La musique est l’espéranto des campagnes internationales, la mnémotechnie des jeunes et la réminiscence des plus âgée.
Quant au viral : il court il court le furet, mais que reste t-il de sa traversée de la toile ?
Quelles sont les campagnes qui vous ont le plus marquées, ou dont la démarche vous a paru la plus audacieuse en musique ?
EVIAN, qui doit autant aux hits qu’aux babys, c’est un son avant d’être un story.
Quel est votre rapport à la musique en tant que professionnel?
Lorsqu’un créatif anglo-saxon vient me présenter une campagne, il me fait d’abord entendre une musique, dont découle l’idée créative. Lorsqu’un français le fait, il raconte son script et oubli la bande son.
Aujourd’hui pensez vous que les artistes ont autant besoin des marques que les marques ont besoin des artistes ?
J’ai toujours prôné que la publicité était un art, mineur certes mais art, la seule façon pour une marque de grimper les marches de l’olympe culturel est de demander aux artistes de les gravir avec elle.
- Pourriez vous nous faire une sélection de 5 morceaux
My Way (il ne faut jamais renier son premier amour)
Carla Bruni (il ne faut jamais renier les histoires d’amour)
Julien Clair (parce que j’aime, j’aime, j’aime)
Ini Kamoze , Here Comes the Hotstepper (parce que c’est Evian)
Stromae parce qu’il s’est trompé de métier il aurait dû être publicitaire, il n’écrit pas des chansons il écrit des slogans.