Live in Concert
Act Music
Sortie : Septembre 2014
En ce soir de juin, une ambiance particulière règne à l’intérieur de la salle parisienne du New Morning. On sent qu’un public fidèle de connaisseurs s’est déplacé. Dès que Manu Katché lance le concert, faisant claquer sa caisse claire et gronder ses fûts, on devine qu’il est venu pour nous faire voyager et qu’il va tout donner. Sous sa casquette beige, un large sourire éclaire son immense envie de jouer. Dans l’air, un moment exceptionnel se prépare. L’album Live in Concert vous fait (re)vivre cette soirée magique, mystique.
Le quartet présent sur scène a joué 130 concerts l’année dernière, ce qui lui donne une cohésion impressionnante, avec un son d’une superbe épaisseur, qui emmène tout sur son passage.
Arc-bouté sur les nappes d’orgue Hammond du subtil Jim Watson, le trompettiste Luca Aquino (qui remplace Nils Petter Molvaer), prend son envol. Dans sa sonorité percutante se faufile le même lyrisme velouté que Paolo Fresu, auprès duquel il a étudié. Les voix jumelles des saxophones de Tore Brunborg, ténor et soprano, proches de Jan Garbarek, dialoguent parfaitement avec les arabesques élégantes de la trompette.
Jim Watson, dont la lourde responsabilité est d’assumer toutes les parties de basses avec son orgue B3, se montre aussi inspiré lorsqu’il s’installe au piano à queue. Ses quelques solos, dépouillés et ramassés, loins de toute virtuosité creuse, apportent une respiration bienvenue.
Le savant mélange entre de discrets apports électroniques et une dominante acoustique constitue l’une des forces majeures de ce groupe. Quand on écoute attentivement, on s’aperçoit que ces musiciens mélangent habilement rigueur extrême et liberté créatrice, afin que tout reste possible. Il est évident que chacun s’écoute beaucoup, avec respect, sans chercher à s’imposer, encore moins à prendre le pouvoir.
Pour lancer un morceau, “Loving You”, Manu quitte sa batterie pour se mettre au piano. Un rôle inhabituel, où il se glisse comme dans un gant, nous rappelant qu’il appartient au cercle très fermé des batteurs-leaders qui composent les thèmes qu’ils interprètent.
Plus tard, lors d’une courte pause, Manu vient au micro remercier le public d’avoir pris la peine de venir à ce concert. La complicité, encore, et toujours le respect. Manu tient aussi à s’excuser pour la gêne éventuelle que pourrait provoquer l’équipe technique qui s’active dans la salle. Car ce soir, le concert est filmé et enregistré. De ce moment capté sur le vif va naître le prochain album live du groupe.
Le quartet vient de démontrer son impressionnante maîtrise dans les changements d’ambiances. Il est aussi à l’aise avec les climats minimalistes qu’avec les passages musclés, parfois au bord du funk, lorsque surgit une nerveuse ligne de synthé-basse (”Keep On Trippin’” et “Beats & Bounce”).
Dans la salle, l’ambiance est devenue totalement électrique. Malgré plusieurs rappels, le public n’est toujours pas rassasié !
Manu remercie à nouveau chaleureusement les spectateurs, leur parle comme à des amis. Pour amplifier l’intensité de cet échange, palpable, Manu encourage le public à chanter, convaincu que les spectateurs réunis ce soir, dans ce mythique club parisien, le feront encore mieux qu’une salle américaine. Adroit, il parvient sans peine à leur faire reprendre en coeur le bref motif d’un ancien titre, “Snapshot”, obtenant alors une communion totale.
Grâce à ces quelques notes, scandées ensemble, le partage entre la salle et le groupe devient physique, et la frontière entre la salle et la scène disparait.
Une fois le concert fini, au milieu de la foule quittant le New Morning, à regret, on devine que la magie de cette soirée vraiment spéciale mettra longtemps à s’évaporer.. Et heureusement, Live in Concert
a tout capté !
Pour (re)vivre ce moment de bonheur, vous savez ce qu’il vous reste à faire.
Olivier Bride