Dr. John

Ske-Dat-De-Dat: Spirit of Satch

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Proper Records/Differ-Ant
Sortie : Septembre 2014

En matière de célébration festive, Dr. John n’est pas le dernier à se prêter au jeu. Malgré ses 73 ans du moment et ses deux cannes, il appente encore sur les scènes du monde entier, toujours prêt à diffuser son gumbo musical nourri de boogie woogie, de rhythm’n'blues, de funk et de rock. En digne rejeton de la Nouvelle-Orléans, le bon vieux docteur s’est plié à une cure de rajeunissement avec Ske-Dat-De-Dat: Spirit of Satch.

À la tête d’une caravane de chanteurs et de musiciens, Malcolm John « Mac » Rebennack s’exécute comme il l’avait fait une nuit à la Brooklyn Academy of Music (New York), au printemps 2012. En treize titres d’un étourdissant fondu-enchaîné, il ne cherche pas tant à reproduire le jazz de Satchmo qu’à le plonger dans un bain de musiques contemporaines, aidé en cela par des institutions vocales come The Blind Boys of Alabama et The McCrary Sisters, des rois du cuivre tels The Dirty Dozen Brass Band, Terence Blanchard, Nicholas Payton ou Arturo Sandoval, et un aréopage de voix d’horizons variés, du rappeur Mike Ladd sur “Mack the Knife” à sa consoeur cubaine Telmary Diaz sur le sensuel “Tight Like This”.
La grande famille, réunie autour du piano du maître de cérémonie et de sa tromboniste et arrangeuse Sarah Morrow, relève aisément le défi, entre virtuosité tranquille et grâce vocale, un rien débauchée par les accents argotiques de l’initiateur. Avec sa complice de longue date Bonnie Raitt, il trempe “I’ve Got the World on a String” dans la fange blues, tandis que le crooner Anthony Hamilton fait planer “Sometimes I Feel Like a Motherless Child” sur un nuage de soul seventies. Dans le registre de la ballade, Ledisi imprime un virage gospel à “Nobody Knows the Trouble I’ve Seen” et Shemekia Copeland devise librement autour de “Sweet Hunk O’Trash”.
Au coeur du dispositif instrumental, les cuivres rugissants dominent la partie, comme l’aurait certainement apprécier “Satch”, dans ce qui est davantage un voyage qu’un hommage. Nicholas Payton sur “What a Wonderful World”, Wendell Brunious sur “That’s My Home”, Terence Blanchard sur “Wrap Your Troubles in Dreams”, Arturo Sandoval sur “Memories of You”, tous participent d’un même élan pour revigorer les standards de leur maître. Et le jeune James «12» Andrews n’est pas le dernier à secouer en tous sens “Dippermouth Blues”. En cela, Ske-Dat-De-Dat : The Spirit of Satch est une invitation idéale pour la Nouvelle-Orléans.

Loïc Picaud