Zenzile

Publié le 16 novembre 2014 par Zikaddict

Berlin


Yotanka
Sortie : Octobre 2014

Comme il l’avait fait en 2011 pour l’étrange film muet de Robert Wienen, Le Cabinet du docteur Caligari (1920), Zenzile entreprend d’accompagner les images du documentaire réalisé par Walther Ruttmann, Berlin, symphonie d’une grande ville (1927), d’une musique adaptée à sa diffusion. La formation angevine renoue ainsi avec l’esprit des ciné-concerts de l’époque, lorsque les orchestres avaient toute leur place dans les salles obscures.

Le temps d’un album conceptuel et entièrement instrumental, le quintette délaisse son dub infusé de trip-hop pour s’aventurer dans des territoires rock. Hormis “Der Tanz” placé en fin de programme, les morceaux aux intitulés germaniques de Berlin dévoilent de nouvelles facettes variées et inspirées, puisant dans le krautrock, le rock progressif ou le jazz des années 1970 et le post-punk tendance industriel qui a suivi.
Ainsi se succèdent une douzaine de tableaux expressionnistes aux sonorités métalliques, aux rythmbes abrupts et aux guitares tranchantes tempérées par les nappes de synthétiseurs. Dynamiques comme “Der Zug” ou atmosphériques tels “Die Architektur” ou “Die Strasse”, ces pièces évocatrices de la cité industrielle se chargent de climats lourds et prégnants.
Au milieu de ces ambiances anxiogènes, le magnifique “Die Laden” apporte un brin de légereté avec sa partie de flûte sortie d’une improvisation jazz, tandis que “Die Bourgeoisie”, qui lui emboîte le pas, dresse une épure au piano.
Doté d’un bel éventail instrumental transcendant les genres et les époques, Berlin s’écoute indépendamment des images qu’il illustre et possède sa propre grille de lecture musicale. Un morceau comme “Der Verkehr”, le plus long de l’album avec huit minutes et trente secondes, constitue une échappée sonore entraînée dans divers territoires par un saxophone. Tout aussi envoûtant, “Die Brucke” traverse des régions contrastées à un rythme ferroviaire.
Porté par un sujet inspirant, Zenzile signe quelques-unes de ses plus belles partitions.

Loïc Picaud