Conflit d’Intérêt: On Chie un Gars

Publié le 05 août 2015 par Feuavolonte @Feuavolonte

On Chie un Gars dans l’Amour: personne ne dit «excellent» sans dire «selle».)

«- Tu sais, Etienne, il y a plusieurs collaborateurs sur le site qui font de la musique. On pourrait faire une section Conflit d’intérêt où on se montre autocritique envers nos projets à l’interne.
– Ok, je vois un peu où ça s’en va. C’est une bonne idée.
– Pour commencer, pourrais-tu couvrir le spectacle qu’Olivier, l’autre rédacteur en chef, anime?»

Vendredi le 31 juillet, j’ai assisté au spectacle On Chie un Gars dans l’Amour, organisé par MTL JTM au chic Bistro de Paris. Comme le nom l’indique, l’événement se présentait comme un après-Osheaga préparé pour les fins palets et, surtout, ceux et celles qui n’ont pas peur de la subversion. Au programme: le rappeur Le Gaucher, le quatuor de Frelighsburg Never Tête Enough, un arrêt de la tournée européenne-française (?) «Pain et Melon» du Nouveau Rappeur et le projet électro montréalais Kid Soda. Chaque présentation est précédée de séances de freestyle massivement impopulaires.

Massivement impopulaire puisque le freestyle n’aura servi, finalement, qu’à réchauffer rapidement les rappeurs qui se présentaient déjà sur scène. C’est ainsi que Le Gaucher et ses deux acolytes se présentent à nous. Ces garçons qui portent des t-shirts de hardcore punk mélangent d’une manière audacieuse le hip-hop et les growls metal dans une mise en scène qui nous laisse croire que, comme les autres projets de la soirée, ils ne se prennent pas trop au sérieux. Tant mieux, ça ajoute de la valeur à la performance. Pour le reste, j’ai pris très peu de notes, encore tiraillé par la moralité d’une section intitulée «Conflit d’intérêt».

Tiraillement augmenté lorsqu’Osheaga est officiellement terminé et que l’animateur arrive. Sûrement encore ébranlé d’avoir vu un homme nu juste avant le spectacle de Schoolboy Q, notre rédacteur utilise comme moyen d’interagir avec la foule des lignes tirées de chansons du Nouveau Rappeur auxquelles le public doit répondre. L’objectif tombe à l’eau lorsqu’il ne fait que crier «Party de lesbiennes?» et que personne n’a la décence de répondre «Céline Bonnier!»

Le ton du reste de la soirée n’est cependant annoncé que lorsque Never Tête Enough prend d’assaut la scène du Bistro de Paris. Torse nu sous des débardeurs à paillettes, les quatre musiciens commencent leur prestation en mimant une défécation de cœurs en carton rose sortant du derrière du chanteur MC Mili Poulet. «On Chie un Gars dans l’Amour» disent-ils. À quoi d’autre nous attendions-nous?

Malgré cette introduction, disons, remarquée, le groupe, formé de deux MC, un tromboniste et un DJ, s’est montré comme la révélation de la soirée. Les performances sont dynamiques, précises et bien que les sujets soient jugés un peu niais (avec des titres comme Gringo Star, Bin Trop Lazy ou le classique Beurre de Raie), on ressent un sérieux dans la démarche des musiciens. «On fait de la musique pour danser», nous disent-ils et pour ce qui est de créer une ambiance, les garçons donnent du fil à retordre aux champions dans le domaine, Barbie’s Resto Bar Grill. Mention spéciale au MC ZeeBrain qui est venu de Frelighsburg pour faire deux titres avec le groupe.

Après une autre séance d’animation de moins en moins cohérente («Serge? …Provigo!» de crier à répétition le maître de cérémonie), sans doute provoquée par les verres de Tremblay à 3 $, Le Nouveau Rappeur arrive pour présenter son rap récent. Peut-être même trop récent, puisque nous étions au maximum 8 personnes qui semblaient connaître un peu les titres. Dans ce genre de contexte, il est difficile d’apprécier les cinq rappeurs qui se roulent par terre en chantant Pogne un pack de pills ou d’autres classiques comme Totons d’homme. Peu de réactions également lorsque la troupe de rap récent a commencé à lancer des boules de pain frais autographiées au public. Et que dire de leur démonstration avec un melon.

Les gens qui ont eu l’occasion d’explorer l’œuvre du Nouveau Rappeur trouvent leur compte durant la performance, mais décrochent lorsque les même beat recommencent à jouer et que le groupe réinterprète certains de ses titres. À ce moment, la foule est plus nombreuse sur le trottoir qu’à l’extérieur. Le trio Kid Soda embarque ensuite pour présenter son électro, le public a déjà quitté, assommé par la soirée (et les boules de pain reçues en pleine poire).

Dehors, je croise Olivier et Élise, les rédacteurs en chef du site.
«Je ne pense pas que je vais faire de critique de ce soir.
– Non, fait la! dit Olivier. Dis que c’était pourri.»

Je n’irais pas jusque-là. J’ai quand même eu du plaisir, notamment avec Never Tête Enough. Mais entendons-nous: toute personne non-avertie de la teneur de la soirée a passé un moment désagréable. Une fois la part des choses faite, on peut séparer le bon grain de l’ivraie et ressortir avec l’envie de voir comment progresseront ces différents projets.

Pour le reste, j’ai étiré le plus longtemps le moment de la remise de cet article. Dans la bonne tradition des vacances de la construction, j’ai joué au canasta et j’ai mangé de la crème glacée en attendant de me faire dire que j’ai perdu ma crédibilité en écrivant un article qui entre en conflit d’intérêt.

Bon retour au travail, ceux et celles qui en ont encore un.