[ITW] Le retour de General Elektriks

Le mardi 09 février 2016 dans Interview, Music

Après cinq ans d’absence, Hervé Salters aka General Elektriks est de retour avec un nouvel album. Discussion avec le roi du clavinet, sur un album aux multiples facettes qui sonne comme un retour aux sources.

Une electropop inspirée de plusieurs autres styles est ce qui pourrait décrire la musique de General Elektriks. Auteur de l’un des tubes que vous avez forcément sifflé au moins une fois dans votre vie, Hervé Salters signe ici un album qui prône la diversification en terme de registres. De la pop, de la funk, de la soul, le tout saupoudré d’electro et de claviers vintage, sont les différents ingrédients que l’on retrouve dans cet album.

To Be A Stranger saura contenter pleinement les fans de la première heure et accrocher les futurs nouveaux.

[ITW] Le retour de General Elektriks

Bonjour Hervé, merci de prendre le temps de répondre à nos petites questions !

C’est avec plaisir !

On est très content de te retrouver après 4 ans d’absence avec ce nouvel album ! To Be a stranger est un mélange de pleins d’influences différentes – Pop, Funk, electro –  Quelle était ta vision de ce nouvel album en cours de création ?

Je n’ai pas vraiment de concept quand j’attaque un nouveau disque, je procède de manière empirique. Je laisse venir les idées, je les approfondis, puis je les laisse décanter un peu, le temps de prendre un peu de recul. Je travaille de nouveau dessus avec une oreille neuve, et je répète le processus jusqu’à ce que le morceau soit fini. Ceci-dit, pour revenir à ta question, il y a une chose dont j’étais sûr en entamant ce nouvel album: je voulais de nouveau programmer les batteries, contrairement à Parker Street pour lequel j’avais fait appel à un batteur.

On a lu que l’album Parker Street avait été composé en 4 mois, pourquoi as-tu pris plus de temps pour celui-ci ?

Parker Street a été composé et réalisé dans l’urgence par la force des choses. Après avoir fini la tournée de Good City For Dreamers, j’ai travaillé sur une musique de série télé puis le 2ème album d’Honeycut, un trio que j’avais monté à San Francisco. Entre temps, la future tournée pour le nouveau General Elektriks était en train d’être bookée. J’ai réalisé en sortant de l’enregistrement d’Honeycut qu’il ne me restait que 5 mois avant le début de la tournée, ce qui veut dire 4 mois pour faire le disque. J’ai plongé tête baissée et suis ressorti du garage quelques mois plus tard avec Parker Street. C’était intéressant de travailler dans l’urgence, dans le sens où le disque devient le témoin d’un moment très précis de ta vie, comme un instantané. Mais ce n’est pas ma manière favorite de travailler. Je préfère avoir le temps de laisser le puzzle s’assembler tranquillement, de pouvoir essayer un maximum de choses. Pour ça, il faut du temps, surtout lorsque tu fais tout tout seul. Si tu ajoutes à ça le fait que j’avais besoin de prendre un break par rapport au projet après la tournée de Parker Street, break qui a coïncidé avec mon déménagement à Berlin, ça explique que l’eau ait eu le temps de couler entre les 2 disques.

Qu’est-ce qui te rend le plus fier dans cet album ?

Le fait de l’avoir fini ! Il y a toujours pour moi un moment dans l’élaboration d’un disque où la montagne paraît trop dure à escalader. Ca arrive généralement au ¾ du processus, lorsque le tout commence à prendre une forme plus définitive mais que les choses peuvent encore pencher dans plusieurs directions selon les finissions choisies. Un gros, gros doute, s’empare de moi et ça devient un peu compliqué. J’essaie de ne pas trop me laisser abattre par ça, notamment en faisant écouter certains morceaux à mes proches pour obtenir leur feedback. Je rebondis sur leurs retours, j’essaie de ne pas trop rester figé, et la confiance revient petit à petit. Puis tu plonges un dernier coup, tu finis, et tu signes.

Pourquoi avoir déménagé de San Francisco à Berlin il y a trois ans ?

Ma femme et moi voulions revenir en Europe. Nous avons beaucoup aimé vivre dans la baie de San Francisco pendant ces 12 années, mais nous sentions le besoin de refaire nos bagages. Nous avons passé quelques jours en famille à Berlin, avons tous adoré la ville, et nous avons déménagé quelques mois plus tard.

On était obligé de l’aborder, car sans lui tu ne serais pas le même : peux-tu nous parler du clavinet, ton instrument fétiche ? Pourquoi cet instrument et non un synthé classique ? Es-tu tombé amoureux grâce à Superstition de Stevie Wonder?

J’ai toujours approché le piano de manière assez rythmique. Quand j’étais petit déjà, j’avais ce jeu assez enlevé. Quand plus tard j’ai entendu ce que Stevie Wonder et Herbie Hancock faisaient avec le clavinet, j’ai naturellement voulu posé les mains dessus, vu que c’est le clavier qui appelle le plus ce genre de jeu. Dès que j’ai pu en acheter un, c’est devenu une des couleurs principales de ma palette. Pas uniquement pour l’aspect funky et rythmique de l’instrument d’ailleurs, mais aussi parce que tu peux vraiment faire autant de bruit qu’une guitare avec, si tu lui branches les bonnes pédales ! J’aime les sons un peu sales. Avec le Clavinet, tu peux vraiment verser là-dedans.

Lorsque l’on te voit sur scène tu as une manière bien particulière d’en jouer, qui nous fait hésiter avec un mix entre de la batterie et de la guitare ! Tu as toujours hésité entre les deux ?

 Oui c’est un peu ça, je dois être un batteur et un guitariste frustré !

Quand on regarde tes différentes prestations live, on a l’impression de découvrir à chaque fois un morceau différent – dans le sens où tu les interprètes de façon unique. Est-ce important pour toi d’amener une vraie différence lors d’un concert ?

Oui, je pense que c’est l’arme principal en live : savoir utiliser l’instant comme quelque chose d’unique. Chaque soir étant différent, plutôt que d’essayer de contrôler chaque prestation en essayant de reproduire le disque soir après soir, je préfère voir ça comme un chance de faire une nouvelle version à chaque fois. Il y a certaines choses qui sont pré-établies bien-sûr, mais nous laissons de la place à l’improvisation, et nous ne jouons pas sur des tempos établis par des machines. Les sons électroniques que tu entends pendant les live de General Elektriks sont joués à la main, comme tout le reste. Ca nous permet de trouver notre groove de manière un peu différente chaque soir.

Qu’est-ce que la Pop Culture selon toi ?

Un camaïeu d’engouements de masse dont ressortent une ou plusieurs esthétiques. Ce que je trouve marrant avec la culture populaire en Europe, c’est qu’elle n’a jamais les faveurs de l’intelligentsia au moment où elle est fraîche et règne suprême. Elle est toujours vue comme une espèce de parent pauvre de la culture avec un grand C. Mais une génération plus tard, elle termine immanquablement dans les musées ou dans les sujets de thèse. Ha ha ! L’approche est très différente dans des pays comme les USA ou le Brésil. La culture populaire y est respectée pour ce qu’elle est : un phénomène majeur.

Peux-tu nous donner un son par décennie ?

60’s =  The BeatlesStrawberry Fields Forever
70’s =  Stevie WonderLiving For The City
80’s =  PrinceThe Ballad of Dorothy Parker
90’s = RadioheadParanoid Android
00’s =  Quasimoto Low Class Conspiracy
10’s =  Kendrick LamarHow Much a Dollar Cost

Pour terminer, on était obligé de vous glisser ici son excellent Tu m’intrigues, qui restera sûrement l’une des plus belles gimmicks jouée au clavinet – l’essence du General  !

 by Pierre