Spectacle ayant déjà une renommée d’excellence, Monumental, une alliance entre les légendaires Godspeed You! Black Emperor et la troupe de danse Holy Body Tattoo, était présenté hier et le sera encore ce soir au Théâtre Maisonneuve.
Photo: Yannick Grandmont
Le genre de spectacle dont on parle depuis dix ans et dont on risque de parler encore dans dix ans. Après une première mouture extrêmement réussie si l’on en croit les critiques de l’époque, les attentes étaient donc grandes face à l’exercice auquel se prêtaient les deux troupes: faire revivre un véritable monument pour deux soirs seulement à Montréal. Je me présente donc au Théâtre Maisonneuve vers 19h30 avec des attentes immenses et une certaine appréhension également, n’étant pas très habitué à la danse contemporaine et ayant donc une certaine peur de ne pas réussir à tout capter. Deux heures plus tard, cette crainte aura été calmée et mes attentes surmontées.
Le spectacle s’ouvre sur un rideau fermé et la musique de Godspeed, jouée, les lumières ouvertes, dans une sorte d’introduction qui place directement le public dans le bain. Lors de la montée du rideau, neuf corps désincarnés apparaissent sur des blocs lumineux, sans bouger, durant de longues minutes. Premier mouvement: une danseuse allonge lentement les bras, l’air sans vie, machinalement, et donne tout de suite le ton. Ce que l’on va voir pour la prochaine heure et demie ne sera pas très humain.
Critique ouverte de la société contemporaine, la chorégraphie est inhumaine: anxieuse et trouble, violente à l’extrême, militaire presque, dans le mouvement. Ses interprètes se donnent au maximum, passant près de se blesser à de nombreuses reprises dans des acrobaties que je ne m’essaierai personnellement pas à reproduire. Accompagné et surplombé par le post-rock du célèbre octet montréalais, le résultat en est que plus fort, plus assourdissant encore. La trame sonore, à moitié composée pour l’occasion et à moitié tirée du catalogue du groupe, satisfait pleinement à elle seule.
Et comme si il manquait encore quelque chose à la prestation, on ajoute un écran de projection entre les deux entités, sur lequel défilent des extraits de textes de l’artiste conceptuelle Jenny Holzer, décrivant le sentiment aberrant qui habite la troupe sous nos yeux et narrant presque les événements. De temps à autre, des animations apparaissent aussi. Par-ci par-là, des silences sont ponctués de répliques et de jeu. On se situe dans une œuvre interdisciplinaire à l’extrême avec Monumental: un mélange parfait de danse, de musique, de théâtre, de littérature, d’arts visuels, avec des jeux de lumières, des sculptures lumineuses et des animations multimédias. Honnêtement, si vous n’êtes pas habitués à ce type de soirée, je vous jure que votre vision de l’art en ressortira changée.
Pour conclure, je dois dire que même si je ne considère pas avoir élucidé entièrement les mystères de la chorégraphie, Monumental reste une performance nécessaire, à voir absolument. C’est de loin l’une des meilleures œuvres que j’aurai vue dans le cadre des critiques que je vous fais ici. Ne manquez pas votre chance, il reste encore quelques billets pour les représentations de ce soir (le 12 avril) au Théâtre Maisonneuve et vendredi (le 15) du côté du Grand Théâtre de Québec.