C’était le dernier soir des préliminaires aux Francouvertes hier. Dans un Lion d’Or rempli à pleine capacité, les trois derniers groupes de la délégation 2017 ont défilé sur scène, précédés par l’Ex de la semaine, Mehdi Cayenne. Disparate, inhomogène, aux antipodes… Cette dernière étape avant les demi-finales n’était pas faite pour les amateurs de constance. On a vécu tellement de choses différentes!
Mehdi Cayenne/Photo: Élise Jetté
Mehdi Cayenne, dès la première toune, réussit à réveiller les grands-mères des concurrents qui se seraient déjà endormies. Faut jamais sous-estimer l’impact d’une bonne série de tapes dans les mains sur le système nerveux d’une septuagénaire.
Il nous livre quelques pièces de son plus récent album, Aube et il s’adresse aux Francouvertes comme un Ex qui ne s’est pas encore tout à fait remis de son histoire d’amour: «Ça a pas changé, osti. Je t’aime encore!»
C’est avec émotion qu’il livre une nouvelle chanson entraînante et lumineuse nommée Sasseville, en hommage à Andréanne Sasseville à laquelle est dédiée cette édition des Francouvertes.
Avant de conclure, il ajoutera: «Beaucoup de choses ont changé depuis mon passage ici! Je me lave, maintenant.» Tout le monde est ben content de ça.
Dave Chose/Photo: Élise Jetté
Dave Chose, le chanteur de Faudrait faire la vaisselle (le band que j’ai toujours en tête parce que ma vaisselle est jamais lavée), est le premier à prendre le micro. Comme il est originaire de L’Ascension-de-Notre-Seigneur (oui, c’est le vrai nom), au nord d’Alma, je me dis que, quand tu viens d’une place avec ce nom-là, tu peux pas vraiment échouer dans la vie. Malgré ma déduction, Dave n’a pas su se tailler une place parmi les neuf candidats des demi-finales. Je suis déçue: parce que j’ai eu tort, mais aussi parce que, moi, j’ai ben aimé sa perfo.
Si l’ensemble musical nous ramasse fougueusement, c’est la voix grinçante de Dave qui nous charme, autant dans les moments intenses où tout se superpose dans un brouhaha grunge que dans les zones plus épurées où on a l’impression d’entendre un lent cri de loup traqué.
Quand il interprète Machine, on croit entendre une influence célinedionesque, mais on n’a pas eu l’occasion de confirmer: «Rentrer dans ta machine qui fait toute/Des mots qui sonnent/Pis qui résonnent».
Osciller entre un fuzz appuyé et un certain arrachement de fond de gorge de rock langoureux et tendre, c’est pas chose simple, mais ici, ça se passe. «Comment je me sens donc?», dira Dave en milieu de prestation, décontenancé par ce qui se passe.
C’est en demeurant les deux pieds sur terre, la pensée simple, mais fluide, que Dave réussit à nous toucher par son urgence de dire les choses telles qu’elles sont. C’est le cas, particulièrement, sur la très sensible Chez Françoise où il nous parle d’être malade dans son lit avec une fille qui goûte meilleur que l’Orangina. Si ça, c’est pas de la poésie, je me demande ce que c’est!
Il termine son show avec Benson Gold qui parle de «faire de la MD dans un chalet et fumer des tops». Comme quoi, on touche les gens en leur parlant d’expériences qu’ils connaissent.
Fred Labrie/Photo: Élise Jetté
Fred Labrie monte ensuite sur scène avec sa troupe de musiciens chevronnés. Il nous parlera entre autres de sa toute première guitare, fabriquée par son père quand il était au primaire et munie d’élastiques. C’est pas avec cette guitare-là qu’il a joué.
Les arrangements bien conçus et la symbiose mathématique des instruments sont difficiles à contredire, la faiblesse de l’ensemble résidant davantage dans la prévisibilité. On entend à maintes reprises le prétexte de la rime pour justifier une phrase dont le sens est plus ou moins perceptible et où l’émotion est plus ou moins palpable.
Fred Labrie et son band sont en maîtrise complète de leur genre, plus RougeFMesque que Francouvertes-friendly. Les textes demeurent également un peu froids, comme lorsqu’on fait rimer amour avec amour: «Si j’ai l’envie intense/De retoucher l’amour/J’ai une peur immense/De réapprendre l’amour.» Une valeur sûre, peut-être.
Renard Blanc/Photo: Élise Jetté
Et c’est le post-rock à saveur électro de Renard Blanc qui conclut l’affaire. Les boys de Saint-Hyacinthe ne laissent pas leur place, comme on peut rapidement le saisir avec la photo ci-dessus où Vincent Lepage songe à manger son micro.
Julien Beaulieu, à la basse et au clavier, réussit à capter notre attention grâce à sa pluridisciplinarité, mais il capte sûrement aussi, avec son chapeau, internet, le câble et un abonnement à Netflix. C’est également sa magic touch qui donne un groove captivant à la prestation.
Julien Beaulieu – Renard Blanc/Photo: Élise Jetté
On ne réussit pas vraiment à voir Alexandre Crépeau durant la perfo. Y’est dans la boucane, mais, au moins, on l’entend.
Le trio masculin enterrera souvent le saxophone d’Ariel Comtois. Un meilleur dosage sera profitable à l’ensemble. Y’a aussi une toune, Lune de miel, qui a l’air de parler d’un viol sadique. Ouf. Ce seront mes deux commentaires féministes de la soirée.
«D’habitude les gens, quand on joue, sont debout et pactés», nous dit Vincent, en fin de parcours. «Moi, j’suis chaud», lui rétorquera l’une des convives.
Et c’est avec Reflet que le band terminera sa prestation, réussissant l’exploit d’être le seul groupe du dernier soir à obtenir son billet pour la demi-finale.