Yes Mccan: Le love c’est pas pour les niaiseux

Yes Mccan

PS. Merci pour le love

Make It Rain Records

***½

yes580

Si on lui demande, Yes Mccan vous dira probablement qu’il est le meilleur MC au Québec ou qu’il le sera, et ce déjà à 27 ans. Ça fait six ans qu’il l’a crié sur la scène du Club Soda pour le 9e WordUp! et après avoir atteint cet âge en novembre, il est sans contredit rendu dans la stratosphère du RapKeb. Avec Dead Obies, il n’est pas loin d’être plus connu que Marc Labrèche. Pour son premier EP en solo, PS. Merci pour le love, Mccan sait exactement ce qu’il veut dire et comment il veut que ça sonne.

C’est sur la nouvelle étiquette Make It Rain Records (filière de Bonsound) qu’il lance ce projet dont la production est assurée entièrement par VNCE CARTER, le beatmaker de Dead Obies. L’unité du projet, c’est Yes Mccan lui-même. Un EP de réflexion sur le chemin accompli et où il veut se rendre ensuite. Que ce soit avec agilité sur F.P.T.N. (le refrain de CDX est ma nouvelle dépendance, comme en 2007 ) ou sur son banger trap Double Cup, Mccan montre ses muscles de MC en autoproclamant sa supériorité à répétition.

Si l’on se fit seulement à Double Cup, c’est facile de le croire. Transporté par un beat tout en distorsions agressives, Mccan est dans une classe à part avec tous ses punchlines de haut niveau. Ma favorite :

« L’ange de la Rolls frappe le parapet/ Tout ce que je voulais c’était pas m’faire prendre/ Vouloir tout prendre c’est venu par après. »

Pendant qu’il affirme sa suprématie, l’insécurité pointe le bout du nez. Les références répétées à l’ADISQ, qui boude Dead Obies à cause de la trop forte présence de l’anglais dans leurs textes, sont mentionnées sur cinq des sept tracks. Quand on pense que l’intro est complètement instrumentale, on peut présumer que ça touche une corde sensible.

En martelant l’ADISQ ou la radio commerciale, il ne joue pas à la victime. Il contre-attaque ce snobisme et cet intérêt malsain pour créer des polémiques autour du « franglais ». Au lieu de se concentrer sur la reconnaissance d’une vieille industrie, Mccan donne toute son attention à ses homies, la scène rap et ses admirateurs. L’essentiel c’est l’entourage, contrairement à l’argent d’une clique hermétique comme il rappe en ouverture de Louvre :

« J’ai peut-être pas le motherfucking bag / Mais au moins mes homies ont mon motherfucking back / We motherfucking back comme tu savais qu’on allait no matter what. »

PS. Merci pour le love, c’est un EP aux thématiques assez récurrentes dans la culture rap et hip-hop. Le p’tit gars de banlieue qui rêvait au succès et qui l’a obtenu. Par contre, du sommet, il réalise ne pas être à la même hauteur qu’un Future ou d’un Kendrick dans la reconnaissance locale. La paye n’arrive pas encore à la cheville de l’ambition et du talent.

Heureusement que Yes Mccan s’en fout, puisqu’il est en réalisation d’un album à paraître en 2018. Si sa plume reste aussi énergique et son flow aussi musclé et versatile, ça sera la sortie rap de l’année.

PS. : À quand un album pour VNCE CARTER ? Il faut une suite à Me & My DJ, ça presse.