CRABE : L’essence du punk

Publié le 12 juin 2017 par Feuavolonte @Feuavolonte

Une belle brochette de bands était à l’honneur vendredi passé dans le tout beau, tout neuf, bar l’Escogriffe avec LAPS, La Fête, Dead Beat Poet Society et CRABE.

Ah l’Esco! Ce temple du garage et du punk rock, ce CBGB montréalais, avec ses murs de pierres et son espace restreint et irrespirable. Attends minute, l’Escogriffe, c’est rendu beau pis toute! Je ne reconnais plus les lieux où j’ai joué avec mon défunt band Pee Wee… C’est devenu presque grand, une immense toile kitsch style tiki recouvre une bonne partie du mur du stage. Bravo, c’est vachement réussi.

Je pique une mini-jasette avec Cédric Marinelli alors qu’il me sert ma bière. Les Marinellis sont en pause jusqu’à ce que le drummer soit complètement remis de sa sérieuse blessure. Prompt rétablissement à lui.

Il est 22 h, le premier band n’a toujours pas commencé… classique Esco.

LAPS / Photo: Mathieu Catafard

LAPS arrive finalement sur le stage. La scène, à mon grand bonheur, est toujours aussi basse et à proximité de la foule. Le groupe livre une performance délirante. Je suis impressionné par le géant bassiste qui s’amuse à jouer avec son instrument dans le dos. Ils ont un son saccadé, robotique, qui me rappelle fortement Ought. Il faut retenir le nom de ce jeune band, les amis.

La Fête / Photo: Mathieu Catafard

La Fête a un son similaire à LAPS. Les deux groupes lançaient d’ailleurs un split album. Le groupe me fait penser au défunt et éphémère groupe Polipe. Les gars ont beaucoup trop de fun sur scène.  Le guitariste va même se caller un shooter de tequila donné par un fan tout en continuant à jouer son riff assis par terre. À l’aise.

Il est 23 h 30. Je croise des amis qui viennent prendre une bière sur la terrasse. Bien content de les voir, un show de 4 h tout seul, c’est long.

Dead Beat Poet Society / Photo: Mathieu Catafard

Les Dead Beat Poet Society nous livrent leur nouvel album; c’est un punk violent et acerbe. Peu de gens se risquent à se mettre à l’avant de la scène. Ils jouent effectivement fort, très fort. Ça peut déplaire à plusieurs, mais bon, dans mon cas, je suis déjà semi-sourd alors à quoi bon.

Sans étonnement, mon iPhone me lâche juste avant CRABE. Il aurait tant fallu que je mémorise ce show… Dieu en a voulu autrement.

Le duo composé de Mertin Höek et Gabriel Lapierre a réussi à créer un joyeux bordel, une hystérie collective ne laissant personne indifférent. C’était ma première expérience et j’ai été estomaqué.

Dans une entrevue l’an dernier, Höek mentionnait: «…en spectacle, on fait dans la performance, on va jusqu’à l’absurde, l’improvisation. On a l’attitude punk, un peu baveuse, mais toujours dans le respect de nous et du public, ça c’est important. Faut que [notre musique] soit positive, que ça regarde en avant, avec émotion.»

Je ne pourrais pas vraiment qualifier autrement la musique de CRABE que comme du CRABE. Ce n’est pas fait pour tout le monde. Dès les premières notes du groupe, j’ai croisé un pote qui m’a lancé d’emblée un «Comment tu vas faire pour tougher ça jusqu’à la fin?»

C’est vrai que les arrangements déstructurés et leurs riffs qui penchent vers le métal, ce n’est pas facile d’approche, mais une fois entré dans leur univers, on embarque dans une remarquable ambiance burlesque et théâtrale.

Le duo en a rendu plus d’un inconfortable. Une symbiose s’est créée entre la foule et les musiciens. Les saoulons n’étaient plus que de simples personnes ivres dans un show, mais de véritables acteurs qui prenaient part à un théâtre collectif fou.

Un dude bien bien avancé tentait de raconter une blague au micro en titubant alors que les deux musiciens se défonçaient sur leurs instruments. Malheureusement pour le gars, on n’a absolument rien compris mis à part, «Justin Trudeau» et «pot».

Le frère de celui qui s’est emparé du micro se chargeait de bousculer les gens au maximum en tombant un peu partout. Il a provoqué de superbes et violents trashs. Un autre tapait sur le drum de Gabriel alors que celui-ci le laissait faire de manière nonchalante.

Le duo a recommencé le début d’une chanson pendant de longues minutes sans jamais vraiment la jouer. Les deux se sont regardés une bonne dizaine de fois avec un petit sourire baveux.

Bref, cette attitude, je la vois peu de nos jours. CRABE provoque les gens, il les pousse à réagir. Le groupe emmerde réellement les conventions sociales et le gentil monde de la musique au Québec.

Si mon iPhone avait fonctionné jusqu’à la fin, vous auriez vu une jolie photo du drummer en train de nous montrer sa poignée de billets obtenus pour le concert, c’était magnifique.