Fêter le weekend à MUTEK

Publié le 29 août 2017 par Feuavolonte @Feuavolonte

Le festival MUTEK s’étend sur rien de moins que 5 jours. C’est long 5 jours à se coucher tard, à voir des shows pendant 6-7 heures par soir et à danser sans arrêt. Mais comme des valeureux guerriers, Mathieu et Jonathan n’ont pas lâché prise et ils se sont tout de même rendus sur le terrain une fois de plus pour vous parler du meilleur de la musique électronique internationale. Retour sur un weekend bien rempli.

Par Mathieu Aubre et Jonathan Arès

L’excellente Dis Fig / Photo: Bruno Destombes

Le samedi de Mathieu

Berlin a toujours eu une réputation forte à l’international et ce n’est certainement pas une mince tâche que de représenter cette ville en dj set, mais Dis Fig, qui est la première artiste que je verrai de la soirée, relève la tâche avec brio. Felicia Chen, de son vrai nom, est une New-Yorkaise d’origine installée dans la capitale allemande depuis quelques années. Elle s’y est déjà taillé une place de choix et ça paraît justement dans son jeu. Elle favorise une techno profonde et extrêmement lourde, mais tout de même intelligente et comprenant son lot de subtilités qui se dévoilent paresseusement à l’auditeur. La foule nombreuse présente sur la Place des Festivals ne se fait d’ailleurs pas prier pour danser et je quitte après une quarantaine de minutes, étonnamment satisfait de la performance.

La prochaine performance me laissera un peu plus dubitatif. C’est au Maskoutain d’origine Automatisme que revient la tâche d’ouvrir un des line-up les plus réussis de l’édition 2017 à la SAT. Je le connais déjà relativement bien à l’avance, ayant fortement apprécié son premier album Momentform Accumulations, lancé l’an dernier chez Constellation Records. Je ne l’avais par contre jamais vu en live et je dois dire que ça relève de l’expérience… L’artiste privilégie effectivement les sons assez harsh et entêtant tout au log de la perfo, accompagnée de projections stroboscopiques. Je dois malheureusement vous avouer que j’ai trouvé un peu difficile d’assister à la prestation pendant une quarantaine de minutes, alors que j’en suis ressorti avec un bon mal de tête, même en portant des bouchons. Le son aurait probablement été moins fort et je n’aurais pas eu à faire ce commentaire, cela dit…

C’est ensuite au légendaire duo Drifmachine de prendre la relève avec un show beaucoup plus calme. Les Allemands, reconnus pour leur maîtrise des synthétiseurs modulaires et leur musique recoupant autant des ambiances dub que techno, prennent un peu de temps à s’installer vu la complexité de leur installation. Le jeu en vaudra par contre la chandelle, alors que les longues pièces progressives et hypnotiques qui suivront seront fort intéressantes. Sans s’éloigner d’un jeu très technique, le résultat garde une étonnante simplicité qui permet une belle relaxation autant qu’un peu de danse vers la toute fin du set. On est encore une fois assez loin d’un son club, mais la soirée est pertinente côté innovation, beaucoup plus que dans la capacité à faire groover le public.

La Montréalaise Marie Davidson, une habituée des clubs berlinois, prend ensuite la relève. Je quitterai son set relativement rapidement, mais la vingtaine de minutes à laquelle j’assisterai sera fort convaincante. Davidson vient nous présenter du matériel tiré de sa discographie déjà bien remplie en live, jumelant boîte à rythme, synthétiseurs et micro pour nous faire vivre le noir désenchantement des clubs dont elle parle sur Adieux aux dancefloors, en faisant du même coup, ironiquement, danser le public.

Et je finirai mon retour sur cette soirée en parlant justement du public présent à la SAT! Vous savez, le genre de stéréotypes qu’on a en tête quand on se parle de gothiques? Et ben ils étaient pas mal tous présents cette soirée-là, allant des chics manteaux de cuir à la Matrix aux habits plus BDSM, on passait par pas mal toute la gamme de déguisements bigarrés, au point où je me sentais un peu seul devant la scène avec mon crewneck de maison de disque nu-disco et ma chemise rose… S/o donc à la diversité fort bienvenue qu’on aura pu observer ce soir-là!

Marie Davidson en grande forme / Photo: Ashutosh Gupta

Le dimanche de Mathieu

Mon dimanche sera plus chill: j’irai rejoindre la plus grande concentration de Français en Amérique du Nord au Piknic Électronik #14, présenté par MUTEK, plutôt qu’à la 5e Nocturne du festival à la SAT. Assez fatigué de ma semaine et appréhendant déjà le FME la fin de semaine prochaine, je me dis qu’un après-midi de lecture en nature ne me fera pas de mal. Je vais donc m’installer confortablement au gros soleil avec Le cimetière de Prague d’Umberto Eco, lecture légère as fuck, devant la scène Solotech, vers 17 h, pour le set de Vincent Lemieux. Le dj montréalais a déjà une bonne foule devant lui et en profite pour faire un set house très estival, rempli d’ambiances un peu plus funk et pop par moment. Le mélange se fait bien, les transitions sont smooth et je passe un bon moment. Comme quoi, un bon dj n’a pas besoin d’avoir la setlist la plus complexe et recherchée du monde pour bien performer, mais seulement de créer une ambiance plaisante et invitante pour le public, ce que Lemieux semble avoir bien compris. On le félicite.

Plus connu, l’Américain Seth Troxler, nommé dj international de l’année en 2013, vient ensuite prendre la relève pour un set que je trouverai un peu moins intéressant que le précédent. Le début est un peu laborieux, avec des transitions pas nécessairement réussies entre des chansons coupées parfois trop courtes et des instrus trop étirés par moments. Selon les commentaires qu’on me fera plus tard, la situation semble s’être améliorée progressivement par la suite, mais je ne ressors pas trop convaincu de l’heure à laquelle j’ai assisté.

C’est la Montréalaise Sarah Hush qui joue (un set annoncé comme du live) sur l’autre scène. Ne connaissant pas trop son stock, je fais confiance à l’affiche, même si j’ai rarement vu un ou une dj danser autant en présentant un live complet de ses pièces… À moins que tout ne soit joué que directement de son ordinateur, auquel cas ça aurait du sens. Je la trouve un peu plus convaincante que Troxler, alors qu’elle favorise un jeu plus rapide, avec des basses plus assumées, et le public ne se fait pas prier pour avoir du gros fun sale, surtout qu’on est directement à côté du stand à bucket! Je quitterai finalement vers 20 h 30, alors qu’il commence à faire trop noir pour lire comme du monde, mais je dois dire que l’envie de rester encore un peu pour Hush ne me manquait pas. Mais faut ben se reposer les jambes à un moment donné, hein!

Seth Troxler en nature / Photo: MUTEK

Le dimanche de Jonathan

C’est devant une piste de danse bondée et électrisée que Nicola Cruz présente sa house tropicale et planante. Ses pièces sont un chaud mélange de house et d’instruments latins, enveloppé de psychédélisme, soit la trame sonore idéale pour explorer une jungle à la recherche de cités perdues, ou bien danser comme s’il n’y avait pas de lendemain à la SAT un dimanche soir! J’aurais bien aimé une plus longue prestation. Seul bémol de la soirée: on trouve dans le set de Cruz quand même pas mal de moments où le beat s’arrête, ce qui donne une expérience de danse en dent-de-scie.

Je vais ensuite voir la fin du spectacle de Harvey Sutherland à la Satosphère. J’ignore si son début était plus jazz, mais ce que je vois se trouve dans la deep house qui cadre vraiment avec mon esprit de fin de weekend: de la musique douce pour les oreilles et qui peut être accompagnée que d’un léger déhanchement. Les vidéos projetées dans le dôme l’exploitent justement au maximum et la foule semble apprécier l’effet du plafond qui tombe, qu’on jouera une couple de fois.

Je redescends finalement pour Africaine 808. Même si leur musique n’est pas mauvaise, leurs rythmes tropicaux ne me convainquent malheureusement pas de rester. On dirait que je n’ai pas trop le goût de replonger dans l’ambiance de fête. L’attrait du lit gagne donc cette fois-ci, mais ce n’est que partie remise!