Jerusalem In My Heart: astucieuse instabilité

Publié le 13 octobre 2018 par Feuavolonte @Feuavolonte

Jerusalem In My Heart

Daqa’iq Tudaiq

Constellation Records

*** 1/2

Si Jerusalem In My Heart n’a jamais été un projet qui explore des sentiers déjà battus, sa nouvelle parution, Daqa’iq Tudaiq, réussit quand même à surprendre. Que ce soit dans sa structure ou son retour à des racines musicales plus traditionnelles, rien n’est laissé au hasard.

J’ai toujours été assez dithyrambique par rapport à JIMH par le passé. Si je n’ai jamais considéré la partie musicale du projet comme parfaite ou à l’abri de toute critique, reste que le background du projet et ses référents sont uniques et extrêmement intelligents. Le souci du détail de Radwan Ghazi Moumneh force l’admiration. Et rien ne diffère sur ce nouvel album de prime abord.

Il se décline en deux volets, suivant les faces A et B qu’on retrouve sur la version vinyle. Sur la première face, on plonge dans une symphonie arabe. Wa Ta’atalat Loughat Al Kalam propose, du long de ses quatre sections, une pièce fort à propos d’une vingtaine de minutes avec un côté on ne peut plus roots. Si on devine les transformations fort actuelles du point de vue de la conception sonore et du traitement des instruments, reste qu’on n’est pas si loin du trad dans la forme et les harmonies. La chanson prend son temps pour se faire découvrir et évite astucieusement de devenir redondante dans ses méandres bucoliques.

C’est sur la deuxième face que les choses se corsent un peu. Ici, on reconnaît le goût du risque dans les expériences électroniques de Moumneh. Si les chansons sont pertinentes et offrent des textures variées, c’est de fil conducteur que cette seconde moitié d’album semble manquer. Entre deux pièces on ne peut plus électroniques, le retour du bouzouki sur Layali Al-Rast se fait un peu solitaire. La pièce suivante, Kol El’Aalam O’youn, vient quant à elle clore l’album d’une façon bien abrupte qui laisse malheureusement l’auditeur sur sa faim.

Pris individuellement, les différents segments de l’album sont admirables. C’est dans leur ordre que se situe peut-être le petit os qui en empêche la pleine appréciation, à cause de contraintes techniques que l’on n’est plus habitués à voir en cette ère de streaming. Ceci dit, JIMH reste d’abord et avant tout un projet multimédia à voir absolument en spectacle, là où la musique prend réellement tout son sens, et, ironiquement, devient si technique qu’elle parvient enfin à s’émanciper des contraintes de l’enregistrement studio.