Demandez à n'importe quel amateur de rock quelle est la première chanson de Led Zep qui lui vient à l'esprit et invariablement, il vous citera Stairway To Heaven. Demandez à Robert Plant quelle est la chanson de son ex-groupe qui lui sort par les trous de nez et, neuf fois sur dix, il vous répondra Stairway To Heaven. Tapez le mot Stairway sur internet et, immanquablement, vous tomberez sur cette chanson. Une échelle vers le paradis dont plus de 50 ans après, on rêve toujours de gravir les échelons. Huit minutes et deux secondes. Un mini opéra électro-acoustique, avec son intro, son final, ses changements rythmiques, ses mouvements harmoniques. Un tube jamais publié en 45 tours, et pourtant l'un des plus diffusés sur les radios du monde entier. Une chanson sur laquelle on a dit tout et n'importe quoi : mystique, satanisme, subliminale, prétentieuse, plagiaire...
L'histoire commence au fin fond de la campagne galloise, dans un cottage du XVIII siècle. C'est dans cette ancienne maison de vacances de la famille Plant que Robert et Jimmy se retrouvent au printemps 70, histoire de se ressourcer après un périple américain exténuant. Dans ce décor rustique, les deux hommes esquissent les prémices de leur prochain album. Jimmy Page a dans sa besace des bouts de musique, qu'il joue à la guitare acoustique. Parmi ceux-ci, une intro en arpèges fait dresser l'oreille à Robert Plant. Mais ce n'est que plus tard, devant le groupe réuni dans le studio de répétition, que le puzzle va prendre forme. Un soir, devant un feu de cheminée, Plant commence à griffonner les paroles : ma main s'est mise à écrire toute seule, presque malgré moi, et en quelques minutes j'avais près de 80% du texte...
"There's a lady who's sure all that glitters is gold..." . Le début de la chanson semble évoquer une femme cynique qui, bien qu'elle fût comblée et obtienne tout ce qu'elle désire, n'offre en retour aucune attention ni considération. Plus tard, Plant dira qu'il a été inspiré par la lecture d'un bouquin du folkloriste écossais Lewis Spence, intitulé "The Magic Arts In Celtic Britain". Et refusera de donner d'autres explications sur le sens du texte, affirmant que chacun peut y trouver ce qu'il veut, selon les périodes de sa vie.
Mais c'est surtout la musique qui retient l'attention. Après une ouverture en arpèges folk ornée de flûtiaux, l'entrée du chant et une rythmique jouée à la 12-cordes, la mélodie change brusquement avec l'irruption de la batterie qui précède un solo de guitare électrique, puis une partie hard rock, avant les mesures finales où seule résonne la voix de Plant. Quand au solo, légendaire, joué non pas sur sa rituelle Gibson mais sur une Telecaster offerte par Jeff Beck, Jimmy Page dut en enregistrer trois versions différentes avant de choisir la meilleure.
Si Stairway To Heaven remporta un succès immédiat, offrant à l'album des ventes record, la chanson vécut ensuite une existence mouvementée. En 1982, le télévangéliste américain Paul Crouch prétendit que le morceau contenait des messages subliminaux à la gloire de Satan, perceptibles uniquement quand on l'écoutait à l'envers. Une assertion d'autant plus crédible, pour certains, que Jimmy Page, amateur de sciences occultes, n'avait jamais caché son admiration pour l'écrivain controversé Aleister Crowley, allant jusqu'à acquérir son ancien manoir sur les rives du Loch Ness. Restait pour le pékin moyen à essayer d'écouter la chanson à l'envers, périlleux exploit à l'époque des platines vinyles... Face à la rumeur, Robert Plant se contentera de répondre que Stairway To Heaven avait été écrit avec les meilleures intentions du monde, et que coller des messages cachés n'était pas sa conception de la musique. Autre accusation, celle d'avoir plagié l'intro sur un instrumental du groupe Spirit intitulé Taurus. Après de longues années de procédure, la justice conclura définitivement en 2020 à l'absence de plagiat.
Bonus : Et du coté Crazy Cover ça donne quoi ???